LA PREMIERE VACHERIE
La première vacherie Juin 1965 !
Mon job consistait entre autres sur le chantier de Clignancourt à passer les commandes, (Ciment, gravillons ,sable,) pour approvisionner les deux centrales à béton.
Tous les soirs tard le Chef de chantier principal (LG) me laisse donc une note manuscrite de sa commande avec les horaires de livraison souhaitées
Ce soir là nous ne sommes plus que 3 au bureau, je rentre du chantier et ne trouve rien sur mon bureau. Pas de commande. Etonné je cherche dans tous les coins; rien, -je demande a mes deux collègues présent, le géomètre et un ingénieur stagiaire –ils n’ont rien vu et pensent qu’il n’y a pas de gros bétonnage demain et que les stocks doivent être suffisants, LG étant parti impossible d’en avoir la confirmation. J’en reste donc là et quitte le bureau vers 20h00 sans passer de commande.
Le lendemain à l’embauche, surprise ! sur mon bureau se trouve l’habituelle note :
20 tonnes de ciment pour 8heures, 20tonnes pour 14h gravillons, sable etc…signée de LG.
Ce dernier entre au bureau en hurlant : le ciment n' est pas là, ou en est la commande ! il me traite de tous les noms, je suis le jeune bon à rien qui n’a pas fait son boulot, c’est scandaleux, le chantier va être arrêté par ma faute, on devrait me virer sur le champ !
Je me défends tant bien que mal, mais je ne fais pas le poids face à ce vieux renard, qui avance toujours ostensiblement sa proximité avec les frères DODIN et me menace de leurs foudres s’il se plaint à eux. (Une spécialité de ceux qu’on appelait ‘’les Nantais’’ et qui avaient connus tout jeune notre PDG d’alors Jacques DODIN).
LG sorti je me démène pour faire livrer au plus vite, ce qui fut fait. Le chantier ne fut pas arrêté.
Chacun vint me dire en aparté qu’il était persuadé que LG avait mis sa note de commande le matin même sur mon bureau avant mon arrivée et qu’il en était pas à son premier coup fourré Mon patron, H Bayart ,quelques heures après , me raconta qu’à mon âge , alors qu’il était topographe, un chef de chantier avait volontairement déplacé ses jalons afin que son implantation soit erronée, et qu’il soit sanctionné. Il m’apporta ce jour son soutien en m’avertissant qu’à 18 ans j’avais encore le temps d’en voir bien d’autres. J’en ai vu d’autres en effet, mais jamais à ce niveau de malhonnêteté.
40 ans après le souvenir est encore vivace. J’ai aussi essayé de me souvenir de cette péripétie en soutenant , chaque fois que j’ai pu, des jeunes mis en difficulté par la mauvaise foi de plus anciens.